Sur le marché du travail, les problèmes d'appariement génèrent du chômage structurel

 



Rappelez-vous : le taux de chômage, c’est le pourcentage de chômeurs dans la population active.

Regardez ce graphique… On voit bien l’effet de la crise des Subprimes sur le taux de chômage dans les quatre pays : à partir de 2008, il augmente parce que l’activité a ralenti ou baissé. Ça, c’est le chômage conjoncturel, le chômage qui est lié à la conjoncture économique ("ça va moins bien économiquement, le chômage augmente; ça va mieux économiquement, le chômage diminue). 

 


Mais regardez désormais ce qui se passe après la crise et mettez de côté la France dont on reparlera plus dans le cours IV. Le taux de chômage aux Etats-Unis, en Allemagne, au Japon baisse… Il baisse mais il ne devient pas nul. Il atteint un minimum que les pays auront du mal à réduire (s’ils le peuvent encore).

Tout ceci pour dire qu’il y aurait une part du chômage qui n’aurait rien à voir avec la conjoncture ou, dit autrement, avec les fluctuations de l’activité économique.

Ce chômage serait lié à des dysfonctionnements du marché du travail, à des problèmes d’organisation des éléments qui compose le marché du travail… donc des problèmes de structure… d’où le terme chômage structurel.

 

Les problèmes d’appariements sur le marché du travail

L'appariement, nous dit le site L’internaute.fr, est l'action qui consiste à rassembler par paires des choses qui sont naturellement compatibles (exemple : faire un appariement de ses chaussettes).

Il n’y a pas de lien (ou très minime) entre l’appariement des chaussettes et le marché du travail. Mais, sur ce marché du travail, il peut y avoir un problème d’appariement entre ceux qui demandent le travail (les entreprises) et ceux qui offrent leur force de travail (les travailleurs et les chômeurs… les actifs). Ils n’arrivent pas à "se mettre ensemble"… comme lorsqu’on qu’on range le linge après une lessive et qu’il y a toujours une chaussette qui n’a pas sa jumelle.

Je vous ai dit qu’aux Etats-Unis en 2020, le taux de chômage avait atteint son niveau minimum : 3,8%. 2,5% au Japon. Il y a toujours un minimum de chômage parce qu’il y a toujours un minimum d’entreprises qui ferment ou, à des degrés variables, des salariés qui se font licencier.

Or, quand un travailleur perd son emploi, il y a un laps de temps qui se déroule avant qu’il n’en retrouve un ou avant qu’il ne puisse réellement l’occuper (le chômeur a-t-il vu l’offre d’emploi ? Le poste est-il déjà créé ou ne sera-t-il disponible que dans quelques temps…?)

Il y a donc des frictions sur le marché du travail ; une friction étant une résistance à un mouvement. Le marché du travail n’est pas totalement fluide. On parle alors de chômage frictionnel. On n’échange pas des travailleurs, donc des « humains » avec leurs familles, comme on échange facilement des actions.

Ce chômage frictionnel peut être aggravé par des problème d’inadéquation spatiale. Très simple à comprendre… Les territoires les plus dynamiques (en trichant un peu), en France, actuellement et si on enlève l'Ile de France, en termes d’emplois,  de création d’emplois, d’offres d’emplois , ce sont la Gironde et la Loire-Atlantique (autrement dit Bordeaux et Nantes).

A l’opposé, les territoires où les taux de chômage sont les plus importants sont ceux du Nord de la France (Lille, Douai, Amiens…) et ceux du Sud de la France (de Perpignan jusqu’à Marseille).

Il y a donc inadéquation spatiale (inadéquation étant le caractère de ce qui n’est pas adéquat, approprié, adapté, …)

Imaginons que vous soyez Marseillais, vous avez 40 ans, vous avez un emprunt (pour votre maison), vous avez une femme et des enfants et vous avez… perdu votre emploi.

Il y a un bien un emploi pour vous mais il est à Nantes. Qu’est-ce que vous faîtes ?



Si vous voulez aller à Nantes, il faut déménager donc il faut arriver à vendre votre maison. Il faut tirer un trait sur ses amis. Il faut que vos enfants perdent eux-aussi leurs amis, que votre conjoint(e) perde ses amis et ses collègues… parce qu’il-elle travaille… Et est-ce qu’il-elle va retrouver facilement un emploi à Nantes ? Et est-ce que la maison sera aussi bien ? Et puis à Nantes, il flotte tout le temps.

Vous allez sans doute attendre un peu qu’un poste se libère ou s’ouvre à Marseille. Ou que vous fassiez autre chose. 

Sans aller jusque-là, dans mon association d’insertion, j’ai vu des « gars » refuser des postes à Toury (donc à 40km) parce qu’ils n’avaient pas les moyens de passer le permis et qu’il n’y a pas de bus.

Mais cela n’est pas fini. Il y a un autre facteur aggravant les problèmes d’appariement : c’est l’inadéquation des qualifications.

Je vous ai dit que la Gironde (Bordeaux) était l’un des territoires les plus dynamique en terme d’emploi. Et c’est vrai : c’est l’un des départements où il y a le plus d’offres pour 1000 habitants.

Voici la carte de France du taux de chômage par département (selon l’INSEE).



Vous pouvez remarquer, si vous connaissez votre carte de France (sinon, regardez sur la page précédente), que le taux de chômage à Bordeaux n’est pas le plus faible, il n’est même pas faible du tout.

Donc on a d’un côté des offres d’emplois et de l’autre des chômeurs sur un même territoire. C’est ballot.

En fait, les emplois disponibles demandent des qualifications que les girondins n’ont pas nécessairement. Et ça va de l’ouvrier en boulangerie ou en boucherie ou en peinture (c’est-à-dire des métiers que peu de personnes veulent faire et donc étudier) au technicien pour l’industrie aéronautique ou autre.

Et c’est un problème qui se pose notamment quand une entreprise de l’industrie ferme, en raison de la concurrence internationale par exemple, et que les ouvriers nouvellement au chômage n’ont pas les qualifications requises pour se réinsérer professionnellement.

Je vous donne un lien (qui date) vers les « 20 métiers où il y a le plus d’offres non-pourvues ». Vous verrez que beaucoup sont des métiers qualifiés mais pas nécessairement qualifiés dans le sens « prestigieux » ou « nouvelles technologies ». 20 métiers en tensions

Mais donc il y a inadéquation des qualifications: les qualifications des chômeurs ne sont pas adaptées à celles requises par les entreprises. Les qualifications des chômeurs ne sont pas nécessairement adéquates.

Ce problème d'inadéquation des qualifications expliquent en grande partie les inégalités dans les taux de chômages en fonction des qualifications.


On voit bien que les moins qualifiés sont le plus au chômage. Dans un monde où la production est toujours plus complexe, le besoin de travailleurs polyvalents maitrisant des savoir-faire complexe exclue les moins qualifiés.

On comprend ici l'importance de la politique d'éducation et de la politique de formation professionnelle. 

 

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