La frustration sociale peut être source de déviance

Robert K. Merton (1910-2003)


Un autre sociologue (que Durkheim), plus récent et moins français (il est états-unien), R.K. Merton, va proposer une autre présentation du lien entre anomie et déviance. Et là aussi, les exemples ne manqueraient pas pour l’illustrer.

Pour Merton, l’anomie (donc la perte de repères sociaux) apparaît dès lors qu’il y aurait une contradiction entre les idéaux à atteindre dans une société et les moyens disponibles pour y accéder. Il y aurait donc un décalage entre les objectifs valorisés et leur accessibilité pour tous. Si les moyens ne sont pas suffisants, alors il peut apparaître une frustration sociale qui peut générer de la déviance.

Là encore, c’est présenté de manière compliquée. Illustrons…

La société, la pub, les réseaux sociaux, etc., nous abreuvent de messages qui disent qu’il faut voyager, avoir une belle voiture, avoir une belle maison et j’en passe. Mais la plupart des gens ne peuvent pas avoir cela. Il y a donc un décalage entre ce qui est valorisé et les moyens dont on dispose.

Par exemple, qu’est-ce qu’un dealer? (Qui est un déviant particulier dont on reparlera : un délinquant) C’est quelqu’un qui veut une belle voiture parce qu’on lui bourre le crâne avec le fait qu’il faudrait avoir une belle voiture pour être heureux, pour être respecté, etc. Mais c’est aussi quelqu’un qui n’a pas les moyens intellectuels ou culturels de l’obtenir sans devenir délinquant. Il y a donc décalage entre les buts à atteindre et les moyens de les atteindre.

(Vous remarquerez que c’est cette belle voiture qui attirera l’attention de la police sur lui mais quel serait l’intérêt d’être dealer si on ne dépensait pas son argent… Et là, je parle des dealers qui ont les moyens d’acheter une voiture).

Mais restons sur cette frustration sociale… Comment expliquer les actes de ces collégiens (ou lycéens mais c’est moins fréquent) qui mettent le feu à leur collège ?

Imaginez que vous êtes un enfant issu d’une catégorie populaire… On vous dit depuis tout petit « il faut bien travailler à l’école, si tu travailles bien, tu auras une belle vie ». (Bien travailler, c’est ce qui est valorisé). Mais à l’école, on vous demande de lire des livres (et vous n’avez pas été socialisé pour), on vous demande d’aimer l’art et de chanter des chansons « qu’on sait pas d’où elles sortent », d’aimer les mathématiques, etc. Et puis, faut faire des exposés mais on voit bien qu’il y en a qui trichent et qui les font avec leur parents… Sauf que les profs, eux, on a l’impression qu’ils ne s’en rendent pas compte, et vous avez des « caisses » tandis que les tricheurs ont des bonnes notes…

Donc, il y a des objectifs valorisés, des enfants qui ont plus de moyens (culturels et économiques) pour les atteindre, et vous… Vous qui n’avez pas ces moyens mais sur votre bulletin, il y a toujours écrit « il faut travailler plus », « il faut plus te concentrer », « applique toi sur les exposés » … Pareil pour vos copains. Alors il se passe ce qu’il se passe sur cette vidéo (lien).

Et si je peux me permettre, il me semble que le lien entre frustration sociale et déviance qui se généralise est ce que montre le film "Le Joker". Ceci dit, ce film s'applique très bien à l'approche de Durkheim.



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