Les effets contradictoires d’une politique de dépenses publiques sur la conjoncture économique

 

L'Etat français s'endette pour lutter contre la crise COVID... Mais attention à un potentiel retour de bâton

Face à situation de récession ou de trop fort ralentissement, la solution qui peut être adoptée par le pouvoir en place est celle d’une politique budgétaire de relance de la demande, qui consiste à utiliser le budget de l’Etat pour « booster » l’économie en soutenant la consommation des ménages (l’Etat leur verse de l’argent ou baisse les impôts), en soutenant la production des entreprises (l’Etat leur passe des commandes). C’est ce qu’on appelle une politique de relance de la demande ou politique budgétaire de relance.

La politique budgétaire est la politique qui consiste à agir sur le budget de l’Etat pour améliorer la conjoncture économique, et particulièrement l’augmentation du PIB ou de la croissance, et la réduction du chômage.

Face à un ralentissement de l’économie ou une récession générant du chômage, l’Etat peut ainsi utiliser un mécanisme simple : comme la crise fait baisser la demande des agents économiques et que mécaniquement la production doit baisser et le chômage augmenter, l’Etat intervient et stimule la demande pour qu’elle retrouve un niveau satisfaisant. Il stimule donc la demande soit un baissant les impôts soit en augmentant ses dépenses soit les deux.

Il y aurait donc un effet positif de l’augmentation des dépenses publiques. C’est exactement ce qu’ont fait Hitler en Allemagne et Roosevelt aux Etats-Unis dans les années 1930.

Mais évidemment, l’Etat n’a pas les fonds nécessaires pour financer ce plan de relance… Il va donc emprunter ce qui lui manque (il va emprunter le montant de son déficit budgétaire).

Le solde budgétaire correspond à la différence entre les (recettes fiscales et non fiscales) de l’Etat et les dépenses de l’Etat. Quand les dépenses sont supérieures aux recettes, il y a déficit budgétaire.



Et c’est là que le problème théorique se pose réellement… Parce que, quand l’Etat s’endette, il ne le fait pas de quelques milliers ou millions d’euros, il le fait à coup de dizaine voire (ici) de centaines de milliards d’euros. Ça n’est pas rien. Et on peut s’attendre à ce qu’il y ait des effets négatifs.   

On appelle ces effets négatifs « effets d’évictions »

L'effet d'éviction correspond à la baisse des dépenses des agents économiques privés qui serait provoquée par une hausse des dépenses publiques.

I

l y a plusieurs explications… Présentons-en deux.

  • Le premier effet d’éviction passe par les impôts…

Plus l’état cumule les déficits budgétaires, plus la dette de l’Etat augmente. Or, une dette, ça se rembourse. Et quand l’Etat s’endette, ce sont les citoyens et les entreprises qui remboursent… Donc on peut s’attendre à une augmentation des impôts et taxes. Pas initialement mais un jour ou l’autre… Or si les impôts augmentent, les entreprises et les ménages peuvent avoir moins de moyens pour dépenser. La demande globale devrait baisser, ou en tout cas moins augmenter qu’elle ne le pourrait. Et l’effet relance sera contrarié.

  • Le deuxième effet d’éviction passe par les taux d’intérêt…

En première, vous avez vu qu’il existait un marché des fonds prêtables (un marché de l’argent, en simplifiant, avec des offreurs/prêteurs et des demandeurs/emprunteurs) …

Or, si l’Etat se met à demander des centaines de milliards d’euros (ça n’est pas rien) sur ce marché, le prix de cet argent va augmenter. Or le prix de l’argent, c’est le taux d’intérêt et si le taux d’intérêt augmente, emprunter devient plus couteux, il faut rembourser plus, s’endetter sur plus longtemps, etc. Donc les entreprises et les ménages auront moins la capacité d’emprunter. Ainsi, les dépenses des entreprises en locaux, matériels, véhicules, etc., et des ménages en maison, véhicules, etc. vont baisser… Donc la demande globale va baisser. Et l’effet relance attendu sera contrarié.


Tout le problème est de savoir si l’effet relance sera contrebalancé par les effets d’éviction. Mais il faut tout de même se rappeler que ces politiques de relance sont des politiques conjoncturelles (donc qui visent à corriger des problèmes liés à la conjoncture économique), et elles se font avant tout lors de phases de crises et visent à éviter les catastrophes sociales liées à l’explosion du chômage.



On peut malgré tout ajouter que, booster la demande globale par la dépense publique dans un pays, c’est aussi prendre le risque de générer de l’inflation : si la demande augmente par rapport à l’offre, les prix augmentent… Si la relance de la demande a un effet positif équivalent à celui négatif généré par une crise, l'effet inflationniste de l'augmentation des dépenses publiques n'apparaît pas. Mais comment être sûr? Surtout que ces politiques budgétaires de relance sont désormais souvent accompagnées de politiques monétaires de relance qui, elles, sont inflationnistes. 

Voir l'article  "les effets contradictoires d’une politique monétaire sur la conjoncture économique"

Enfin, booster la demande globale, c’est aussi prendre le risque de détériorer la balance courante (si la demande augmente mais qu’elle augmente en produits étrangers.


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