Les effets contradictoires d’une politique monétaire sur la conjoncture économique

 


Lorsque la conjoncture économique n'est pas bonne, un gouvernement peut décider de mener une politique budgétaire (avec ses effets contradictoires).

Voir l'article "les effets contradictoire d'une politique de dépenses publiques sur la conjoncture économique"

Mais le gouvernement peut aussi envisager une politique monétaire. Si "l'argent" est plus facile d'accès, on peut envisager qu'il y aura plus de dépenses effectuées par les agents économiques, et cela peut jouer à la relance de l'activité économique. 

Vous avez déjà peut-être vu que ce sont les banques commerciales qui sont les créatrices de monnaie mais que la Banque Centrale, la banque des banques, pouvait réguler les choses, et donc faire varier la masse monétaire (la quantité de monnaie en circulation) à la hausse ou à la baisse en jouant sur les taux d’intérêt : quand la Banque Centrale fait baisser son taux directeur, les taux d’intérêt baissent, les emprunts augmentent, il y a plus de monnaie créée que de monnaie détruite, la masse monétaire augmente ; et inversement quand le taux directeur  augmentent, la masse monétaire diminue.

Lorsque la banque Centrale fait baisser son taux directeur, les taux d'intérêt baisse. L'argent est moins couteux. Dit autrement, s'endetter coûte moins cher puisque les taux d'intérêt ont baissé. Les emprunts augmentent. Or ces emprunts servent à faire des dépenses donc les dépenses augmentent, la demande globale dans le pays augmente, donc la production augmente et potentiellement l'emploi aussi. 

Vus pourriez vous demander pourquoi on ne le fait pas plus souvent. 

La raison est connue: il y a un effet pervers bien pervers qui est l'inflation. 

Raisonnons simplement. Imaginons que les élèves d'un lycée aient 10€ d'argents de poche. Le prix du kebab est de 10€ (c'est pour l'exemple). Imaginons que le lycée dans lequel ils sont leur donne 10€ par semaine pour les féliciter de votre assiduité. Il le fait pour tous les élèves assidus et peu importe comment il fait pour imprimer des billets. Les élèves temporairement le sentiment d’être deux fois plus riche.  Mais les vendeur de kebabs, eux, ne peuvent peut-être pas fournir plus de kebabs et, surtout, il vont se rendre compte que les élèves ont plus d’argent. Ils vont donc augmenter leurs prix et, potentiellement, ils peuvent faire passer le prix du kebab à 20€.

Au final, c’est le problème des valeurs nominales et des valeurs réelles : les agents économiques ont plus d’argent mais ils ne sont pas réellement plus riches.

Dans notre exemple, les élèves sont déçus et l’absentéisme part à la hausse. Le proviseur donne désormais 20€ pour inciter les élèves à être assidus… Mais au bout du compte, cela ne change rien. Le mécanisme continue. Voire il peut s'emballer (comme dans l'Allemagne des année 30' ou le Venezuela actuel). 

En voulant bien faire, le proviseur a désorganisé l’économie locale. Ceux qui ne reçoivent pas d’argent de poche parce qu’ils ne sont pas lycéens se retrouvent d’un seul coup moins riche. Et puis, les prix du kebabs (et d’autres produits) ont explosé : c’est l’hyperinflation.

Cet exemple nous permet de comprendre deux choses :

  •  Plus la masse monétaire augmente, plus la demande globale augmente. Or quand la demande augmente, l’offre augmente en conséquence et pour que l’offre augmente (le PIB dans un pays), il faut souvent embaucher. Donc faire varier à la hausse la masse monétaire est source de croissance économique et d’emplois (et inversement, si la masse monétaire diminue).

  • Mais, en faisant varier la masse monétaire à la hausse, on peut générer de l’inflation. Le problème de l’inflation, quand elle est trop forte, c’est qu’elle s’auto entretient et désorganise l’économie: les entreprises qui voient que les composants et les produits qu’ils utilisent coûtent plus cher, augmentent leur prix pour maintenir leur profit. Mais dans ce cas, l’inflation s’aggrave. Et les ménages peuvent subir une grosse perte de pouvoir d’achat, et donc demander des hausses de salaires ou d’aides sociales ce qui aggrave encore l’inflation ou, si les hausses de salaires ne sont pas là, les ménages s'appauvrissent ce qui peut conduire tout autant à des tensions politiques et sociales.

C'est le problème auquel ont été confrontés les Etats-Unis et l'Europe suite aux plans de relance de l'économie face à la crise COVID.

Outre le fait qu'un plan de relance budgétaire peut accroitre l'endettement public, un plan de relance monétaire accroît l'inflation. Pour faire face à un choc négatif de demande des ménages et des entreprises (la demande globale baisse), l'Etat peut demander à la banque centrale de faciliter la création de monnaie. Or comme pour l'exemple du kebab, il peut s'ensuivre une désorganisation de l'économie qui se traduit par de l'inflation. 


 

Vous pourriez me demander : « mais pourquoi ne pas faire l’inverse et faire baisser les prix ? ». Ce qui s’appelle la déflation : si augmenter la masse monétaire fait augmenter les prix, baisser la masse monétaire ferait baisser les prix, ce qui pourrait être bon pour la demande.

En fait, c’est un autre danger. On lui donne le nom de spirale déflationnisteQuand les prix baissent, ils se passent deux choses : les entreprises gagnent moins et les acheteurs attendent que les prix baissent encore plus. Sauf que pendant ce temps-là, les entreprises licencient, le chômage augmente, donc la consommation baisse, accentuant la baisse des prix, la baisse des recettes des entreprises et les acheteurs voyant que les prix baissent retardent encore leurs achats, etc., etc., etc.



Ainsi, il existe des politiques monétaires de relance de la demande. Cette politique monétaire consiste à faire varier la masse monétaire à la hausse en baissant les taux d’intérêt et donc en facilitant les emprunts privés (qui coûtent moins cher puisque les taux d'intérêt ont baissé). Les banques commerciales comme le Crédit Agricole, la Banque Pop, etc., vont dès lors inventer de la monnaie (en l'écrivant sur leurs compte). Or plus d'emprunts de la part des ménages et des entreprises, c'est plus de dépenses dans l'économie et donc plus de production et donc plus d'emplois. 

Mais la politique monétaire vise aussi à contrôler l’inflation. 

Et ces deux missions peuvent entrer en conflit : relancer la demande, c’est prendre le risque de générer de l’inflation alors que baisser l’inflation (ce qu’on appelle la désinflation à ne pas confondre avec la déflation qui est la baisse des prix... La désinflation, c'est la baisse de la hausse des prix... Ca va rentrer ou bien?!)… baisser l’inflation, donc, c’est prendre le risque d’agir négativement sur la demande. En effet, pour freiner l'inflation, il faut freiner la création monétaire. Il faut donc augmenter les taux d'intérêt. Mais si les taux d'intérêt augmente, emprunter coûte plus cher. Donc les emprunts diminuent, donc moins de dépenses dans l'économie...

C'est compliqué donc. La Banque centrale doit jongler.

Surtout qu'il peut y avoir un autre problème conjoncturel que celui de la croissance ou de l'emploi ou de l'inflation: la dégradation de la balance courante (le pays importe trop ou n’exporte plus assez).

Dans ce cas, la politique monétaire peut consister à baisser la valeur de la monnaie pour que les produits s’exportent plus facilement (ils couteraient moins cher sur le marché international). Mais dans ce cas, les produits d’importation couteront plus cher (inflation importée). Et puis pour que la valeur d'une monnaie baisse, il faut qu'elle soit moins rare ou plus abondante (c'est la loi de l'offre et de la demande), il faut donc créer plus de monnaie. Et cette création monétaire génère de l'inflation.

Pas facile donc...

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